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Grand Angle
Un plan gouvernemental pour miser sur la sobriété et préserver la ressource
Qu’ils soient issus des rapports successifs du GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) ou de travaux scientifiques qui en découlent, les chiffres relatant la disponibilité de la ressource en eau renouvelable sont en baisse constante depuis plusieurs décennies. Constat qui a poussé le gouvernement à présenter en mars 2023 son Plan eau, feuille de route articulée autour de cinquante-trois mesures pour mieux piloter la gestion de la ressource et faire face aux épisodes de sécheresse intense.
Par Hélène Imatte
Le petit cycle de l’eau.
© Office Français de la Biodiversité. Réalisation Matthieu Nivesse (d’après OIEau), 2018
Preuve irréfutable du réchauffement climatique, le territoire métropolitain a enregistré une diminution de son capital en eau naturelle de 14 % sur la période 2002-2018 par rapport à la période 1990-2001,
selon une étude publiée en 2022 par le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires. Pourtant essentielle aux écosystèmes et aux activités humaines, la ressource en eau renouvelable - comprenez l’eau douce entrant sur le territoire par le cycle naturel de l’eau, soit les cours d’eau et les précipitations qui ne retournent pas à l’atmosphère - subit un double phénomène : la hausse de l’évapotranspiration en raison de la hausse des températures atmosphériques, couplée à une baisse des eaux de pluie. Face à ce tarissement préoccupant et à l’aggravation des épisodes successifs de sécheresse, dont l’été 2022 et ses conditions sans précédent, le Gouvernement a présenté le 30 mars 2023 un plan d’action pour une gestion résiliente et concertée de l’eau.
Objectif : 10 % d’économie d’eau d’ici 2030
Adossé à cinquante-trois mesures concrètes, il entend répondre aux enjeux de sobriété, disponibilité et qualité de la ressource. Afin d’atteindre les 10 % d’économies d’eau prévus d’ici 2030, le plan entend notamment accélérer la sobriété des usages. « Aujourd’hui, 80 % de nos nappes ont un niveau bas ou très bas », avait déclaré Emmanuel Macron lors de la présentation du dispositif. De quoi justifier les économies d’eau demandées à de nombreux secteurs économiques très consommateurs, comme les centrales nucléaires ou l’industrie agro-alimentaire. Du côté des particuliers, le Président avait annoncé la mise en place d’un « Ecowatt de l’eau » sur le même modèle que l’instrument servant à réduire la consommation d’électricité en hiver. Devant le retard pris par ce dernier, c’est finalement VigiEau qui a été lancé en juillet 2023 pour permettre aux internautes de s’informer sur les restrictions locales et les gestes adaptés pour baisser leur consommation. Le dossier de la « tarification progressive de l’eau », expérimentée sur plusieurs territoires depuis 2017 et dont la généralisation avait été annoncée dans ce plan, n’a presque pas avancé depuis son annonce. À cet égard, en novembre 2023, le Conseil Économique Social et Environnemental (CESE) a livré des premiers constats mitigés, arguant que les conditions d’une généralisation n’étaient pas encore réunies.
Réduire les fuites et optimiser le stockage
Autre objectif du plan, la lutte contre les fuites. Quand on sait qu’un litre d’eau potable sur cinq est perdu dans les fuites, l’amélioration du stockage et du transport de l’eau semble nécessaire pour
combattre ce gaspillage. Aussi, le plan prévoyait-il de « travailler avec l’ensemble des maires qui ont la compétence de l’eau pour faire le maximum avant l’été et accélérer ces travaux, avec ces cent quatre-vingt millions d’euros supplémentaires qui vont, là aussi, nous permettre de répondre à l’urgence »,
avait alors déclaré Emmanuel Macron. Six mois plus tard, la majorité des cent soixante-dix communes identifiées pour des réparations prioritaires est toujours dans l’attente, les travaux nécessitant
des études préalables et des attributions de marchés publics très chronophages, rendant de ce fait impossibles les réalisations en urgence.
Enfin, pour préserver la ressource, le plan vise également un objectif de réutilisation de 10 % des eaux usées d’ici 2030, contre moins de 1 % actuellement. Un chiffre qui place la France au rang des mauvais élèves, largement devancée par l’Italie et ses 8 % ou l’Espagne et ses 14 %, sans parler des près de 90 % de réutilisation en Israël. Pour ce faire, près de mille projets de réutilisation devraient se déployer sur le territoire d’ici 2027 et aider à une meilleure valorisation des eaux dites non conventionnelles.