TERRITOIRES
Champigny-sur-Marne
« Une ville durable n'est pas qu'une ville verte »
Champigny-sur-Marne, ville de contrastes et de diversité, se dresse fièrement aux portes de Paris. Avec près de quatre-vingt mille habitants, cette commune du Val-de-Marne incarne le dynamisme de la banlieue est parisienne. Bordée sur deux côtés par les méandres de la Marne, Champigny offre un cadre de vie unique où l’urbain s’entremêle harmonieusement avec la nature.
Entretien avec Laurent Jeanne,
Maire de Champigny-sur-Marne
À Champigny-sur-Marne, ville francilienne culturelle et sportive, la municipalité opère un virage radical en se saisissant des enjeux écologiques pour le bien-être des Campinois. Après une longue phase de latence et d’errements, Laurent Jeanne, Maire depuis 2020, est résolu à bâtir une ville résiliente en mariant tous les jalons du durable, alors que l’avènement de deux nouvelles gares dans le cadre du Grand Paris Express est propice à transformer Champigny en une ville attractive, durable et connectée.
« Nous menons de nombreuses actions pour recréer de la continuité urbaine et du lien social entre des quartiers sociologiquement contrastés... »
Champigny porte une signature sportive forte. De quelle façon la conjugue-t-elle avec les enjeux
liés à la durabilité ?
Historiquement, peu de villes françaises ont vu autant de champions émerger de leurs quartiers ! Cette fibre sportive fait partie intégrante de notre identité, et nous souhaitons l’inscrire pleinement dans notre stratégie de développement durable. D’où nos investissements massifs pour rénover les équipements vétustes et proposer une offre sportive de qualité, vectrice d’épanouissement et de lien social. Le sport participe aussi à la santé publique, en facilitant l’activité physique pour tous dès le plus jeune âge.
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Et avec les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, vous misez sur cet héritage ?
Absolument ! Ces JOP ont constitué une formidable opportunité de donner un nouveau souffle à notre tradition sportive, en l’inscrivant dans une dynamique pérenne et durable. Nous avons d’ailleurs accueilli le relais de la flamme olympique lors d’un moment convivial et festif où le public a pu prendre part à un carnaval de marionnettes géantes. Au-delà de cet événement, nous structurons déjà un ambitieux volet « sport et santé » : nouvelles installations, programmes éducatifs, soutien aux athlètes de haut niveau... Le tout en associant étroitement la jeunesse campinoise !
Parlez-nous de cette jeunesse à laquelle vous semblez très attaché...
Elle représente l’avenir de notre ville, alors nous plaçons un accent fort sur son implication citoyenne et son éco-éducation. D’où la création du premier conseil municipal des enfants, qui réunit quarante-quatre jeunes issus de l’ensemble de nos écoles primaires et collèges. Ils s’approprient déjà leur ville en formulant des propositions lors de ces instances. C’est un terreau idéal pour former les éco-citoyens de demain. Nous venons également de lancer un conseil local de la jeunesse pour les 13-17 ans.
Revenons sur votre projet global de « ville résiliente »...
Notre vision transcende les seules problématiques vertes. Nous voulons bâtir un écosystème urbain durable et équilibré sur tous les plans : environnemental certes, mais aussi social, économique et démocratique. Une ville résiliente, c’est un territoire où chacun, quelle que soit son origine, peut s’épanouir dans un cadre de vie sain et un habitat décent.
Nous brisons ainsi les carcans de la « ville-dortoir » en incitant les habitants à se réapproprier l’espace public. Nous menons de nombreuses actions pour recréer de la continuité urbaine et du lien social entre des quartiers sociologiquement contrastés, entre d’un côté des cités quasiment 100 % HLM, et puis, juste en face, des zones 100 % pavillonnaires. L’aménagement de la grande coulée verte traversant la ville ou la création d’espaces paysagers ouverts visent justement à favoriser ces connexions apaisées.
Nos conseils de quartier, diagnostics « en marchant » et autres outils de concertation permettent aussi d’associer les habitants eux-mêmes à cette réflexion sur le désenclavement et la résilience du territoire.
Notre objectif ? Garantir la mixité et l’équité en évitant les dérives de l’entre-soi. D’autant qu’avec l’arrivée du métro du Grand Paris Express et ses deux milliards et demi d’investissements publics prévus, notre ville change radicalement de visage et nous veillerons à ce que chacun puisse profiter de ce bond en avant, sans céder aux sirènes de la gentrification. Voilà le défi : opérer une transition écologique et urbanistique profonde tout en maintenant ce creuset social et un cadre de vie agréable
pour tous.
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Cet aspect suppose certains préalables, non ?
Oui, et le chantier de remise à niveau a déjà commencé. Il a d’abord fallu résorber l’habitat indigne et insalubre encore présent, via un plan de rénovation urbaine. Nous avons aussi dû refonder la tranquillité publique en créant une police municipale armée et équipée, là où nos prédécesseurs avaient tout laissé à l’abandon. Une condition sine qua non pour garantir un cadre sain et sécurisé permettant cette réappropriation de l’espace public par nos concitoyens.
Une autre difficulté fut de combattre la fracture numérique en remettant à niveau tous les outils, souvent vétustes, voire détournés par le passé. Nous avons dû procéder à un véritable audit de fond et investir massivement dans un système d’information et d’échange moderne et performant. Celui-ci facilite aujourd’hui grandement les échanges avec les habitants, qui par exemple voient traités leurs signalements divers en un temps record.
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Les efforts de végétalisation semblent être importants pour votre politique ?
Oui, c’est l’un des piliers de notre stratégie : la fin de l’ère du tout-goudron et béton. En arborisant les rues, en imposant un minimum de 30 % de pleine terre dans l’immobilier ou encore en créant des placettes paysagères, nous faisons renaître la nature au cœur des quartiers les plus denses. Mais au-delà du simple cadre de vie, cette approche « verte » contribue à la résilience climatique de notre territoire et favorise la biodiversité. Combinée à une connexion étroite avec les habitants, cette trajectoire s’inscrit dans un cercle vertueux. Par exemple, avec la multiplication des fleurs, certains riverains se sont mis à réclamer des ruches pour produire du miel localement.
Les Campinois sont investis de multiples façons. Cela nous aide, par exemple, à structurer des filières vertueuses comme celle de la valorisation des biodéchets. Ceux-ci sont collectés par vélos-cargos électriques, en partenariat avec une entreprise de l’économie sociale et solidaire. Une filière vertueuse du « champ à l’assiette » a également été structurée pour redistribuer les invendus alimentaires encore consommables aux épiceries sociales. Tout cela participe d’une démarche d’économie circulaire que nous voulons pérenniser.
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La culture semble également faire partie intégrante de votre vision d’une ville durable et inclusive. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Tout à fait, une ville ne saurait être durablement vivable et épanouissante sans une offre culturelle riche et accessible à tous. Elle contribue aussi à favoriser ces connexions apaisées et durables déjà évoquées. C’est pourquoi nous investissons massivement pour rénover nos équipements culturels vétustes comme les médiathèques. Mais au-delà, nous avons complètement renouvelé notre programmation de spectacles vivants avec une exigence : la variété des propositions doit refléter la fabuleuse mixité de notre population, un creuset de soixante-dix nationalités différentes ! D’où des têtes d’affiche nationales bien sûr, mais aussi la mise en lumière d’artistes locaux issus des quartiers populaires. Sans oublier la création d’événements grand public originaux comme notre salon du livre illustré ou encore des « bulles culturelles » éphémères qui apportent la culture directement aux pieds des habitants.