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Innovation

La France met les batteries
électriques au pas de charge

En mai dernier la première giga­factory française de batteries électriques ouvrait ses portes dans le nord de la France. L’opération de réindustria­lisation du tissu économique de l’hexagone à plusieurs milliards d’euros, vise à restaurer une souveraineté et une sécurité nationales et européennes mises à mal par une Chine qui possède 70% des capacités de production mondiale dans ce secteur jugé stratégique et sensible.

Par Marc Auxenfants

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Le 30 mai 2023, Automotive Cells Company (ACC) – une coentreprise de Stellantis, TotalEnergies et Mercedes-Benz – lançait à Billy-Berclau Douvrin (Pas-de-Calais) la première usine géante française de batteries pour véhicules électriques. La « giga­factory » (nom créé par le constructeur Tesla) produira d’ici la fin de l’année ses premières cellules de batteries au lithium-ion. Sa capacité initiale de
13 GWh pourrait atteindre les 40 GWh et équiper ainsi cinq cent mille véhicules par an d’ici 2030. Plus de deux mille nouveaux emplois directs sont avancés. Le coût total devrait s’élever à environ deux milliards d’euros. Huit cent millions ont déjà été investis : la moitié à 50 % par ACC et ses trois action­naires ; le reste étant à la charge de l’État et de collectivités locales. Le groupe a également reçu une aide d’un milliard trois cent mille euros de la France, de l’Allemagne et de l’Italie dans le cadre d’un plan de sept milliards d’euros visant à construire une série de nouvelles installations dans ces pays et à soutenir la création d’une filière européenne de batteries électriques. 

« L’opération s’inscrit à la fois dans le plan de réindustrialisation de la France - une des priorités de la politique économique du Gouvernement - et, à plus grande échelle, dans la stratégie de construction d’une véritable politique industrielle pour le continent européen, capable de rivaliser avec celles de la Chine et des États-Unis », indiquait pour l’occasion le ministère de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique. (1)

Trois autres gigafactories de ce type suivront dans les Hauts-de-France. À Douai, Envision AESC (Automotive Energy Supply Corporation) - filiale japonaise du groupe chinois Envision - ouvrira en 2025 un site de 9 GWh en phase initiale, puis de 24 GWh d’ici 2030, grâce à trois extensions planifiées.

Elle pourrait équiper deux cent mille véhicules électriques Renault par an. Trois mille emplois directs devraient voir le jour d’ici 2030. Le projet d’un investissement d’un milliard trois cent millions d’euros pour la première tranche a déjà reçu un financement de quatre-cent-cinquante millions d’euros de la Banque européenne d’investissement (BEI), bras financier de l’Union européenne.

Pour Ambroise Fayolle, Vice-président de la BEI, « cet investissement stratégique dans AESC permet à l’Europe et à son industrie automobile de se doter d’outils industriels à proximité de leurs sites de production. » Dunkerque accueillera les deux autres giga-usines usines du Grenoblois Verkor (16 GWh en 2025 et 50 GWh en 2030), et du Taïwanais ProLogium (30 GWh d’ici 2030). En faisant de l’ancienne région sidérurgique des Hauts-de-France « la vallée européenne des batteries électriques », le gouvernement français veut « réconcilier souveraineté européenne et souveraineté nationale, prospérité et climat, héritage industriel et innovation d’avenir. »

Depuis 2020, l’Europe compte désormais une cinquantaine de gigafactories européennes opérationnelles, ou en cours de construction, implantées dans une dizaine de pays (2).

 

Réduire la dépendance vis-à-vis de la Chine

Toutefois, comment redéployer une stratégie industrielle européenne autour des voitures électriques, quand environ 70 % des capacités de production mondiale de batteries de véhicules électriques sont localisées en Chine ? Et même si l’UE peut diversifier ses approvisionnements en minéraux nécessaires à la production des batteries, « elle reste fortement dépendante de la Chine en termes de capacité et de technologies de raffinage de ces trente-quatre métaux identifiés comme critiques, » notait Elvire Fabry, la chercheuse senior en géopolitique du commerce à l’Institut Jacques Delors, le 30 septembre dernier sur France Culture. (3)

Pour à la fois assurer l’approvisionnement de ces méga-usines, garantir l’autonomie stratégique du pays et atteindre la neutralité climatique, « les objectifs se portent donc désormais sur l’émergence de projets couvrant l’ensemble de la chaîne de valeur des batteries », indique le ministère. Ces projets portent d’une part sur l’extraction, le raffinage, la transformation des matières premières critiques, la fabrication de matériaux, de composants de batteries, de machines et de procédés de production innovants. Ils concernent également la collecte, le réemploi, le reconditionnement, le recyclage et la réincorporation des matières. « Il importe également de consolider la capacité de la filière française à se positionner sur les prochaines générations de batteries (tout solide, et nouvelles chimies alternatives au lithium-ion) », ajoute le ministère. À termes, ces projets serviront ainsi au développement de nouvelles générations de batteries, plus performantes, plus sûres, à moindre coût et à durée de vie plus longue que celles commercialisées actuellement.

 

Sécuriser la chaîne de valeur

Ces programmes visent aussi à mettre l’Union européenne au niveau de la Chine et des États-Unis, en termes d’investissements annuels dans cette chaîne de valeur. « C’est donc toute une logique de réduction des risques sur la chaîne de valeur qui est mise en place dans le cadre de ces alliances industrielles européennes », commente Elvire Fabry.  Et ce, à un moment où la Chine commence à investir sur le marché européen pour développer ses propres
gigafactories en particulier en Hongrie.

​

(1) https://www.economie.gouv.fr/la-strategie-nationale-batteries-un-axe-cle-de-france-2030-sur-les-mobilites-durables

(2) https://insideevs.fr/news/576184/liste-emplacement-gigafactory-europe.

(3) https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/affaires-etrangeres/batteries-et-voitures-electriques-l-europe-face-a-la-chine

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Territoires Durables

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